SÉNATEUR socialiste de l’Essonne, rapporteur du budget de la recherche, Michel Berson est l’auteur du rapport « Réussir le cluster de Paris-Saclay » publié en mai 2016.
LE FIGARO.- Les attitudes de refus des écoles d’ingénieurs et le cavalier seul de l’université Paris-Sud ne signifient-ils pas la faillite de Paris-Saclay ? Michel BERSON.- C’est un immense gâchis. Un gâchis profondément regrettable, parce que ce territoire regroupe ce qui se fait de mieux en France, voire en Europe, en matière de recherche et de coopération scientifique. Tous les atouts sont là pour créer une très grande université de recherche performante et conforme aux standards internationaux. C’était le projet initial. Nous n’y sommes pas. Nous sommes aujourd’hui dans une situation de blocage. De dix-huit acteurs, on est passé à sept, puisque l’École polytechnique était opposée au projet. Maintenant c’est Centrale Supélec qui n’en veut plus. Pour que la copie ne soit pas rendue blanche, la présidente de Paris-Sud propose désormais une troisième solution. Elle seule, avec les organismes de recherche nationaux. Avec ce petit noyau, on peut, je l’espère, aboutir à un nouveau départ. Mais la période électorale n’est pas propice. Rien ne sera décidé avant juin ou juillet.
Quels sont les responsables de ce « quasi-échec » ? L’État est le premier responsable, car il n’est pas capable de parler d’une seule voix. Nous n’avons pas un ministère de la Recherche mais plusieurs. Sur le plateau, sept tutelles différentes interviennent ! Le ministère de la Défense soutient l’École polytechnique qui lui est rattachée, le ministère de l’Agriculture défend AgroParisTech, le ministère de l’Industrie défend l’Inria, le ministère de l’Économie, l’Institut Mines-Télécom et celui de l’Enseignement supérieur, les universités… Les 60 millions d’euros soudainement accordés à Polytechnique la veille de Noël 2015 par le ministère de la Défense ont été ainsi perçus comme une provocation par les autres. Il y avait pourtant moyen d’inciter écoles et universités à travailler ensemble ! Quant à ces dernières, on leur demande de se mettre d’accord et de construire une « université cible », mais elles en sont incapables à cause du poids de l’histoire, de ce système qui oppose universités et grandes écoles, lequel est unique au monde et d’un autre temps. C’est parfaitement absurde d’opposer les uns aux autres. Elles ont tout à gagner à mutualiser pour se développer.
Qu’attendez-vous du prochain gouvernement ? Il faut absolument que le futur premier ministre s’empare de ce dossier et que toutes les décisions soient décidées en interministériel. Sinon, il ne se passera rien. Cette question pourtant fondamentale de la recherche n’a quasiment pas été abordée pendant cette campagne électorale. Je le regrette. J’ai parlé de Saclay à l’entourage d’Emmanuel Macron, notamment avec Jean PisaniFerry. Il faut absolument un exemple de rapprochement qui réussisse en France. Emmanuel Macron se dit prêt à booster les crédits de l’enseignement supérieur et de la recherche. Nous verrons.
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